L’écoconception et les matériaux composites : atout majeur ou tendance de fond ?

Si la fibre de lin permet de réduire l’impact environnemental d’un matériau composite, l’écoconception d’un produit accentue la démarche vers la durabilité. De la plante à l’élaboration du matériau, jusqu’au processus de fabrication, l’économie circulaire et la fin de vie des composites.

Écoconception et matériaux composites
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Une large famille de matériaux innovants

Depuis plus de 50 ans, les ingénieurs n’ont de cesse d’inventer des matériaux hautement techniques afin de répondre à la demande croissante des industriels et des consommateurs. Ces assemblages innovants ont donné naissance à des matériaux hybrides appelés composites. 

La combinaison d’un ou de plusieurs composants aux propriétés physiques ou chimiques de nature différente, a pour objectif d’augmenter la performance d’un matériau aux qualités de haute valeur ajoutée. De plus, l’incorporation de fibres de lin et de chanvre dans ces composites polymères, (avec matrice et renfort) valorise leurs propriétés mécaniques.

Mais pour transmettre la résistance et la souplesse recherchées à l’ensemble du matériau composite, l’adhérence à la matrice, thermodurcissable ou thermoplastique, doit d’être parfaite. Les liaisons le plus souvent chimiques et fibres de lin provoquent une réaction avec la matrice polymère.

Si les études scientifiques démontrent que la solidité, la légèreté, la capacité d’amortissement des vibrations sont largement reconnues, on peut y ajouter également l’acoustique, liée probablement aux 70% de cellulose que la fibre de lin contient. Les recherches se focalisent donc sur la qualité du renfort qui dépend de son application, là où le tissage joue un rôle important comme élément structurel.

Ce dernier est unidirectionnel, bidirectionnel ou incorporé de manière aléatoire, lorsque les fibres courtes s’ajoutent au composite. En découle un champ d’applications et d’usages des composites biosourcés très vaste, dans les sports, l’aéronautique, le nautisme, la musique et le son, le mobilier et les objets et le mobilier.

L’écoconception : du prototype à l’échelle industrielle

Tout en restant créatifs, les designers, les entrepreneurs et les ingénieurs se sont emparés des composites biosourcés dans une démarche d’écoconception globale et cohérente, et ce grâce à l’innovation technique et à la recherche.

Pour de meilleures pratiques environnementales et sous l’impulsion des agences conseil en RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises), on affiche en toute transparence la provenance des matériaux et son acheminement - circuits courts privilégiés -, le processus de fabrication, jusqu’à la réduction, la valorisation des déchets et la fin de vie des matériaux.
On parle donc d’économie circulaire, d’analyse de cycle de vie en maintenant une sélection des matières premières recyclées ou réemployées dont l’impact environnemental est, par ailleurs soutenue, par l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie).

Dès la phase d’élaboration d’un produit, les projets d’applications ont été développés, mais sont restés parfois au stade du prototype. Par l’exemplarité de son processus d’écoconception, la chaise Flax est devenue iconique en 2015. Ses concepteurs, la designeuse Christien Meindertsma, l’entreprise Enkev spécialiste des fibres naturelles et l’agence de développement durable Label/Breed se sont associées afin d’élaborer une assise rigide, 100% renouvelable (dans certaines conditions) à partir d’un matériau naturel unique. Ce dernier, constitué de couches de tissage et de feutre de lin, d’un plastique biodégradable, réinvente une typologie de produit écoconçu à partir d’un gabarit d’une feuille de 60 x 100 cm !

Avec l’emploi de fibre de lin en renfort et 50% de résine matière naturelle pour la matrice, la jeune entreprise Notox suit la voie de l’écoconception, en fabricant des planches de surf sur mesure avec du lin. Certes, ces initiatives vertueuses et marchés de niche ont défriché le terrain. Mais l’évolution des composites à base de fibres naturelles et de lin, la rapidité des étapes de fabrication, l’utilisation des outils numériques ont accéléré le développement de solutions industrielles.

Réduire l’impact environnemental

Le processus d’écoconception implique aussi d’envisager la fin de vie des composites biosourcés, à savoir, leur réemploi ou leur recyclage. Si beaucoup de pistes tendent à réduire l’emploi des résines thermoplastiques, en remplaçant celle-ci par des matières naturelles, on est encore loin du 100% végétal. Cependant, avant le recyclage, il existe des possibilités de réincorporation des fibres. Dans l’industrie automobile, on utilise plusieurs fois le même matériau composite incluant des fibres de lin, en remoulant le bio composite sans en détériorer le renfort.

Pour compenser les pertes de capacité mécanique dues au recyclage des anciennes fibres, on procède à la réincorporation de fibres, bénéfiques sur le plan économique et environnemental. En effet, ces composites se recyclent en partie, afin de réduire les déchets. Depuis 2021, le groupe industriel Chomarat, référent dans l’univers des composites et textiles techniques, développe des solutions alternatives dans une démarche de développement durable.

Une stratégie qui convoque les matériaux biosourcés (fibres naturelles) ou recyclés dans ses composites et étudie leur fin de vie. En partenariat avec le Groupe Beneteau, l’entreprise a lancé la production en moule fermé de pièces composites avec un complexe de renforts techniques en chanvre/verre destiné au transport maritime et à la construction navale. Les fibres de chanvre cultivées en région française ont permis à l’échelle industrielle de réduire l’impact environnemental tandis que la R&D de l’entreprise s’est fixée un défi encore expérimental, dans l’utilisation de fibres recyclées et de pièces composites en fin de vie.